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Retrouver la liberté

Après deux semaines d’écriture sous la contrainte.  Qui ont été productives, mais au prix d’une lutte acharnée contre moi même.  Je n’ai pas réussit à (re) trouver le plaisir d’écrire, la fluidité et la surprise de voir se déployer mon histoire et mes mots, librement.  J’ai réussit à écrire, mais sans que jamais la petite lumière du plaisir et de l’amusement ne s’allume.  J’ai même délaissé toute forme de jeu dans mon écriture, conférant aux mots leur sens premier, sans me permettre de disgressions, d’envolées lyriques, à peine une petite métaphore. Considérant que j’écris sur le thème « comment se rendre libre ? »  je me suis dit qu’il y avait un problème.

Le résultat de ces deux semaines et néanmoins intéressant.  J’ai écrit environ 25 pages, expérimenté avec des techniques alternatives et j’ai lutté de plus en plus jusqu’à me retrouver bloquée à la fin de mon acte 1.   Malgré mes tentatives pour forcer le passage dans l’acte 2 ce dernier me résiste et pour cause, si l’on suit le modèle de Blake Snyder, c’est la phase « Amusement et jeux ».  Or je suis loin de m’amuser et je ne trouve pas le jeu.

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J’ai donc décidé aujourd’hui de prendre un peu de distance, de m’offrir la Liberté retrouvée. Il y a eu des signes, comme cet article d’Anaël et puis les mots de L. (son coaching à distance à base de photos de tarentules) et enfin j’ai retrouvé mon livre de Julia Cameron Libérez votre Créativité.  L’année dernière j’avais commencé à suivre son programme de reconnexion avec mon artiste intérieur et j’avais dévissé à la semaine 2… Cette fois je compte aller un peu plus loin d’autant plus qu’un an après les mots de Julia Cameron résonnent différemment en moi.  Il faut croire que j’ai changé. Beaucoup d’éléments qui me dérangaient dans ce livre, notamment toute la dimension spirituelle sur notre Dieu intérieur, ne me choquent plus.  Je relis les lignes que j’avais soulignées avec la nette impression de mieux les comprendre et même de les avoir expérimentées.

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Je n’abandonne pas mon projet de roman (loin de là).  Mais j’ai maintenant conscience de ce qui me manque pour  l’écrire.  J’ai besoin de faire plus de recherches concrètes sur l’univers et la période, pour nourrir mon écriture. J’ai trop axé mes recherches sur l’aspect personnel et il me manque beaucoup d’éléments de contexte, j’ai d’ailleurs révisé pas mal de mes cours d’histoire.   Et puis j’ai besoin de trouver en moi la liberté dont je veux parler.  C’est aussi bête que ça.  Je pensais qu’écrire ce roman me permettrait de me libérer (artistiquement parlant) en fait c’est l’inverse.  Je ne pourrais l’écrire que quand je me serais libérée de mes croyances négatives, de mes peurs, du poids de ce passé trop présent. Ce processus est une vague, une respiration, et il faut l’accepter tel qu’il est.  Je suis contente d’avoir abandonné la lutte, ça me redonnerait presque l’envie d’écrire.

 

 

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Dans le vif du sujet

Il y a des mois que je me prépare à renouer avec l’écriture et cette idée me réjouit à peu près autant qu’elle me terrifie. J’ai du me faire aider par un coach (et un ami), Denis Tison. Après les premiers blocages levés, je me suis dit, ça va rouler, je vais enfin revenir à l’écriture aussi naturellement que ça l’a toujours été pour moi.  En réalité, les années à juger le travail des autres et à engranger du savoir théorique sur la dramaturgie m’ont fait perdre ce lien simple et intime à moi-même et à l’évocation des sentiments et des émotions. J’ai perdu en lyrisme ce que j’ai gagné en structure. Je cherche à construire, à édifier, à verrouiller tout ce que je peux par des lectures, du savoir, une confirmation que je fais bien ce qu’on attend de moi. Là encore j’obéis aux règles ! La transgression restant pour moi un très long chemin à parcourir, vers un peu plus de liberté. Quelque part je ne me fais pas confiance, je ne me laisse pas la liberté nécessaire  pour créer. J’ai peur de ce qui pourrait en sortir, peur de ne pas avoir assez de matière et d’énergie brute au fond de moi pour écrire cette histoire.  Ce roman sur l’histoire de mon arrière grand-mère, qui me tient tant à coeur et qui m’apporte depuis des mois beaucoup de force, d’envie et d’énergie, vais-je réussir le mener à bien ? En réalité, je devrait plutôt travailler sur le mener à mal, le malmener *, car je sens que c’est en sortant des attendus (ceux des autres, et les miens) que j’arriverai à lui donner son sens. Le travail d’écriture n’est pas à un paradoxe près et c’est ce qui me plait tant dans ce labyrinthe de Pan*.

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Le sens de cette histoire que je croyais porter au fond de moi, qui me semblait clair, une évidence absolue.  Ce sens m’a échappé toute la semaine.

*** Première semaine ***

J’ai prévu cet été un mois d’écriture sur ce projet. J’ai travaillé toute la semaine sous la contrainte, dans la souffrance et le doute.  J’ai construit avec patience et méthode.  J’ai déconstruit ce qui n’était pas en place.  Mais cet exercice s’est fait dans la lutte, j’ai beaucoup dormi, j’ai beaucoup lu, j’ai beaucoup fuit.  Face à mon tableau en liège et à mes petites cartes, j’ai peiné à mettre en place les moments clé de l’histoire, certains ont naturellement trouvé le place, surtout au début, mais la fin de l’histoire, elle m’échappe toujours.  Curieusement, la fin je la connais, c’est la fin réelle de la vie d’Alice, elle s’est fait tuer.  Mais pourquoi ? Donner un sens à cette mort par la fiction est presque impossible.  Cette mort n’a aucun sens ! La réalité sur laquelle je me base est aberrante.  Comment donc la réorganiser, s’en libérer pour que la fin brutale de la vie d’Alice prenne enfin du sens ? Et quel sens ?  Je marche sur des oeufs, je ne veux pas me tromper, et j’avoue n’avoir pas encore trouvé.  C’est une fin fermée et une fin ouverte en même temps, pour l’instant c’est très flou.

La méthode du tableau et des cartes proposés par Blake Snyder dans son livre « Save the cat », m’a vraiment séduit dans la mesure où le travail semble être pré-mâché. Mais cette méthode exige une rigueur et une clarté de vue qui me font encore défaut sur ce projet.   J’avais établi un planning de travail pour la semaine et ce planning a quelque peu dérapé. Un après-midi passé à la plage m’a rappelé la nécessité de prendre de la distance, de la détente comme moyen de résoudre les problèmes. J’ai aussi compris qu’il me fallait limiter mes exigences, accepter que je n’écrirais pas un chef d’oeuvre du premier coup et en un mois (même un mois de travail acharné).  Néanmoins,  j’ai commencé à construire, les trois quarts de l’histoire, ce tableau me servira de guide dans l’étape suivante. Même si j’ai bien conscience de son incomplétude, libre à moi de le reprendre régulièrement au cours du travail.  Je sens confusément, que passer à la phase d’écriture proprement dite s’impose. Est-on jamais assez prêt pour cela ?

DSC03005J’ai l’impression de réapprendre à faire du vélo (Dieu sait -et mes parents aussi- à quel point cet apprentissage a été douloureux pour moi). En effet la théorie ne suffit pas à trouver l’équilibre.  Il ne suffit pas de penser sans fin : pied droit, pied gauche, pied droit, pied gauche, de tenir le guidon en regardant où on va. Moi j’ai lutté longtemps, incapable de gérer tous ces paramètres en même temps, parce que pour que ça roule, il faut surtout ne pas y penser, trouver la sensation d’équilibre et faire confiance aux automatismes du corps. Me voilà donc à nouveau sur mon vélo à 5 ans sur le parking désert d’un hypermarché Mammouth près de Nancy, je dois oublier les échecs passés, la peur de tomber, de ma faire mal, je dois y arriver, car mes parents me regardent hilares face à mon aptitude à foncer droit dans les chariots isolés qui parsèment le parking (à l’époque, les chariots n’étaient pas payant et pas aussi bien rangés). Je tente de me concentrer autant que je peux, pour ne pas me planter à nouveau, je souffle lentement, papa me pousse et puis c’est à moi « pied droit, pied gauche, ne pas y penser… hop »

  • Je lis d’ailleurs en ce moment un livre théorique salutaire (très ironique et anglo-saxon) How not to write a novel  de Howard Mittlemark & Sandra Newman
  • Les philosophes stoïciens identifiaient ce dieu avec l’Univers ou du moins avec la nature intelligente, féconde et créatrice.
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Des vivants et des mots

Aujourd’hui, j’ai encore une fois pu mesurer ma prise de distance avec la réalité. Ma froideur face au drame et presque mon indifférence. J’ai vu ma grand-mère basculer, passer de l’autre côté, quitter son corps le temps d’un malaise qui l’a laissée livide et cadavérique. Je l’ai vue morte et j’ai pensé à moi : elle avait encore tant de choses à me transmettre.

Aujourd’hui, je n’ai pas perdu ma grand-mère, mais ce coup de semonce, m’a fait prendre conscience de l’urgence de la transmission. Traverser ce moment aux côtés de mes cousines, puis ensuite trouver le courage de leur parler de mes propres angoisses qui se retrouvent chez elles, bien entendu. partager peut-être pour la première fois sur le mode de la sincérité, sans essayer de masquer nos peines et nos doutes.Voir chez les autres tous nos travers, les leur reprocher et puis répéter à l’infini des schémas appris malgré nous. Admettre qu’être vivant c’est pouvoir se tromper, souffrir, être faible et que dans toute recherche d’absolu, de perfection, de calme idéal il y a la mort au bout. Le fin du fin du lâcher prise, la dernière convulsion, la fin des douleurs, des doutes et le début du deuil si complexe. La mort c’est comme une addition qui ne tombe jamais juste, il faut sans cette payer la différence d’une vie de plus, d’un être de moins.

 Quel sera le prix de mes recherches ?

Mot tajaneLes mots laissés par des morts, sont tout ce qu’il reste d’eux aujourd’hui.  Des mots, de vieilles photos et des mémoires qui prennent l’eau.  J’ai finalement lu les lettres, les rapports et les comptes rendus d’interrogatoires.  Dans les lettres, j’ai découvert la noirceur du quotidien, le malheur d’être pauvre et le sort qui s’acharne sans que l’on comprenne bien pourquoi.  J’ai lu la résilience, la force de ces anç-êtres, leur désir de s’en sortir et de lutter, mais aussi leurs moments de doute.  J’ai écouté leurs mots, senti leur main trembler, vue l’encre pâlir sous les traces de leur larmes sur le papier.  J’ai touché du doigt ces papiers à lettres bordés de noir pour la période de deuil et puis celui mauve aux bords légèrement irréguliers. Les papiers à cigarette, transparents imprimés à l’encre vieillie des machines à écrire et les fautes qu’on ne peut pas effacer, les phrases qu’on a pas le temps de relire, jetées à la hâte dans une enveloppe, le timbre léché et hop à la poste.

Ce qu’il reste de nous toujours vivant après notre trépas, ce sont les mots. Les lettres envoyées et écrites à la main, à l’encre violette, sont notre mémoire.  J’aime ces vieux papiers jaunis, ouvrir les enveloppes et découvrir un monde inconnu, fantasmé, ces temps qui nous ont précédés.  Si par moment j’ai pu ressentir le poids du passé et  voir les cicatrices encore douloureuses qu’il a laissé.  Je pense suis de plus en plus convaincue qu’il faut écrire cette histoire. Il me reste à trouver ce que je veux en dire, ce qui fait écho en moi.

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En quête d’Alice

Alice est mon arrière grand-mère maternelle.  La mère de la mère de ma mère. Quelle phrase étrange et quelle définition simpliste et redondante.  Mais je n’ai pas d’autres mots pour qualifier Alice que je n’ai pas connue, que ma mère n’a pas connue et que ma grand-mère a à peine connue.

C’était la guerre et Alice est morte, laissant derrière elle 7 enfants orphelins. Ma grand-mère venait de fêter son 9ème anniversaire quand elle a appris la mort de sa mère. L’évènement a d’abord été présentée comme un accident pour « épargner » les enfants les plus jeunes.  Mais Alice a été tuée de sang froid, par un officier Nazi, un soir dans l’arrière salle déserte d’un café de Sens,  sans que l’on puisse vraiment expliquer pourquoi. Alice avait cependant toutes les raisons de se faire tuer, à la fois résistante et interprète travaillant pour les Nazis. Elle entretenait une relation privilégié avec le chef de la Komandantur.  Alice n’avait pas bonne réputation, elle avait été maintes fois prévenue du danger de ses activités.  Qui était Alice ?  Une Mata-Hari de province ? Résistante ? Collabo ? Femme libre enferrée dans la nécessité de ce temps de guerre, ou suivant son plaisir malgré tout. Et la morale dans tout ça ?

Alice

Statut Ce projet n’est pour l’instant qu’une envie. Je vais faire des recherches, et notamment recueillir les éléments auprès de ma grand-mère avant de me décider à écrire cette histoire, qui est déjà en soi très romanesque.La question centrale étant le traitement de la vérité et du fictif.

Alice m’échappe sans cesse, elle me fascine et je vais essayer d’en savoir plus.  J’ai envie de  jouer avec toutes les images qu’elle me renvoie.  La mère courage, la vamp séductrice, la femme résistante au service des autres, l’amoureuse de l’ennemi, la veuve suicidaire qui a suivi son mari, Camille, dans la mort, six années après la brutale disparition de ce dernier. J’ai envie de raconter son histoire, mais surtout jouer à la raconter comme je la rêve ou la devine. Avec Alice c’est mon héritage que je modèle, incertain, versatile.  J’en suis la dépositaire, je la porte en moi, sa mémoire  longtemps oubliée et niée dans ma famille me traverse. Dans les moments d’angoisses, dans ma peur de mal faire, d’être démasquée, dans les multiples craintes infondées qui sourdent du fond de mes entrailles, je me sens proche d’Alice.